Resumé :
Que peut-il être reconnu à celui à qui n’est pas reconnu l’usage de la raison ? La psychose fait effraction dans l’identité d’un homme, vient bouleverser sa pensée, son discours et sa conduite Ŕ « il ne peut pas » Ŕ au point d’hypothéquer sa place parmi les autres hommes, jusqu’à son invisibilité sociale. Selon le concept d’Anerkennung chez Hegel, l’homme ne peut se penser sujet que parce qu’il est reconnu comme tel par autrui. Ce n’est qu’ainsi reconnu et reconnaissant autrui de même qu’il pourra accéder à une autonomie potentielle. Nous référant à notre pratique d’ergothérapeute en psychiatrie de l’adulte et à la lecture des travaux d’Axel Honneth, nous ferons proposition qu’une activité partagée peut être un possible mode de reconnaissance d’un homme psychotique : « tu peux ».
ILLUSTRATION DE COUVERTURE
(Lucian FREUD, Self Portrait (unfinished), 1956)
L’inachevé dirait-il l’inachèvement d’une identité toujours en quête de son entièreté ? La main se porte au visage comme pour en vérifier la réalité, estimant le grain et l’épaisseur de la peau, premier objet de la perception. Le regard perplexe précède cette main puis l’accompagne, redoublant une expérience sensible Ŕ la vision et le toucher Ŕ devenue examen dérisoire d’une certitude de soi-même dont la vérité s’effrite. A hauteur du miroir nous sommes alors les spectateurs d’une angoisse incommunicable, celle d’une réflexion qui, échouant à sa suture ouvre un peu plus l’abîme. Nous aurons ici retrouvé la situation familière d’un homme schizophrène tout à sa contemplation. Nous le reconnaissons, mais il peine à lui-même se reconnaître et revient sans cesse à son œuvre propre : une image de soi qui le confirme.
MOTS-CLÉS :
Reconnaissance, psychose, activité, interdépendance